
Le 10 août 2022 marque l’anniversaire de la mort de Houshang Ebtehaj, connu sous le nom de plume de « Sayeh » (l’Ombre), l’un des plus grands poètes de la littérature persane, dont l’influence sur les générations suivantes est immense.
Houshang Ebtehaj est considéré comme l’un des plus grands poètes contemporains d’Iran. Bien qu’il soit principalement reconnu pour sa maîtrise du ghazal, il s’est également illustré avec succès dans d’autres formes poétiques. De nombreux critiques littéraires le placent parmi les plus grands poètes de toute l’histoire de la littérature persane.
Il est surtout connu pour ses ghazals et ses poèmes inspirés par le style de Nima (le style « nimâ’i »). Il fut l’un des premiers et des plus importants disciples de Nima Youchidj. En plus de la poésie, il s’est également consacré à la recherche littéraire et à la musique. Très jeune, il est devenu l’une des figures majeures de la poésie iranienne, consacrant sa vie entière à servir la culture et la littérature de son pays.
Sayeh est né dans une famille aisée à Rasht. Encore lycéen, il publie son premier recueil de poèmes, intitulé Naghmeh-ha (Les Chants). Ce recueil de style classique était influencé par les poètes du mouvement littéraire du « retour à la tradition », mais Ebtehaj s’est rapidement orienté vers la modernité poétique. Dans sa jeunesse, il tombe amoureux d’une jeune fille arménienne nommée Galia, amour qui inspira une grande partie de ses poèmes romantiques. Progressivement, il s’intègre dans les cercles littéraires de Téhéran, où il fréquente des figures telles qu’Ahmad Chamlou, Nima Youchidj, Mehdi Akhavan-Sales et Simin Behbahani.
Grâce à sa proximité avec des personnalités comme Nima Youchidj, la poésie prit pour lui une toute autre dimension et devint de plus en plus centrale dans sa vie. De ces échanges naquit un cercle littéraire appelé l’Association littéraire de la chandelle brûlée (Anjoman-e Adabi-ye Sham’-e Soukhteh). Les membres principaux en étaient Houshang Ebtehaj, Ahmad Chamlou, Siavash Kasraei, Morteza Keyvan et Nima Youchidj. Avec le temps, Ebtehaj devint l’une des figures les plus marquantes de la poésie iranienne, avant et après la Révolution islamique.
De nombreux critiques ont écrit et parlé de l’importance de Sayeh dans la littérature contemporaine. Mohammad-Reza Shafiei-Kadkani, lui-même poète et universitaire renommé, considère Sayeh comme le plus grand poète de ghazal depuis Hafez.
Les poèmes de Sayeh ont été mis en musique à de très nombreuses reprises, ce qui témoigne de leur richesse dans le domaine de la chanson persane. Outre ses liens étroits avec les musiciens, il fut également l’un des directeurs les plus influents de la musique à la Radio nationale iranienne.
En plus de la poésie, il s’investit aussi dans la recherche littéraire. Il publia l’une des éditions critiques les plus fiables du Divân de Hafez, sous le titre Hafez be sa’ye Sayeh (« Hafez, par Sayeh »).
Houshang Ebtehaj est décédé le 10 août 2022 à l’âge de 94 ans, à Cologne, en Allemagne. Il a été enterré dans le parc Mohtasham à Rasht, sa ville natale.
L’un de ses plus beaux et célèbres ghazals:
Que nul ne découvre ce qui se passe entre nous,
Car seul un regard suffit à transmettre la lettre de nous.
Écoute, de mes lèvres muettes, je te parle,
Réponds-moi d’un regard : c’est notre langue à nous.
Depuis longtemps, nul ne s’est aventuré sur le chemin de l’amour,
Mais aujourd’hui, tous les regards du monde sont tournés vers nous.
Même si nul ne perce le secret de nos cœurs,
Partout résonne le murmure de l’amour caché de nous.
Sois le printemps de mon cœur et de mon âme, ou sois l’automne, peu importe,
Que de jardins fleuris sont devenus l’automne de nous.
Tout ce conte d’Éden et ce désir de paradis
Ne sont qu’illusion et discours d’un monde à nous.
Qu’ils n’écrivent pas nos noms en préface du Livre de la raison,
Partout où s’écrit le Livre d’Amour, c’est la trace de nous.
Le soleil et la lune brillent du feu de notre temple, ô Sayeh,
Ô Merveille, de cette flamme claire qui brûle aux âmes, en nous.