L’Iran face au nouvel ordre économique international

Les experts estiment que le monde, après une période d’intégration économique globale, entre désormais dans une phase de fragmentation, caractérisée par une multipolarité économique et politique croissante. Ce changement profond dans l’ordre économique mondial offre à l’Iran une opportunité stratégique de redéfinir sa place sur la scène internationale.
Historiquement dépendante d’un système basé sur le « bio-pétrole », reliant ses exportations de pétrole aux pays occidentaux contre l’accès aux devises internationales et aux importations de biens de développement, l’Iran fait face à une rupture majeure. Les sanctions maximales sur le secteur pétrolier et bancaire ont mis fin à ce « grand échange » historique, obligeant le pays à repenser ses politiques économiques.
Dans ce contexte, les sanctions ne sont pas simplement des obstacles temporaires, mais doivent être comprises dans la dynamique mondiale de rivalité des grandes puissances. La réponse iranienne doit donc être une nouvelle position stratégique économique et internationale prenant en compte cette fragmentation mondiale.
Plusieurs concepts économiques structurent cette réflexion. La chaîne d’approvisionnement implique l’ensemble des acteurs nécessaires à la production et à la livraison des biens, tandis que la chaîne de valeur désigne la création de valeur économique tout au long du cycle, de la conception à la distribution. Par ailleurs, la notion de corridor économique dépasse les infrastructures physiques pour inclure des liens économiques, politiques, sociaux et sécuritaires étroitement imbriqués.
Dans ce cadre, l’Iran doit évoluer selon six niveaux d’action cibles, allant de la construction d’infrastructures de transport jusqu’à la gestion intégrale de chaînes de valeur et la mobilisation des centres de population et des capitaux.
L’idée de « méga-échange » décrit une interaction stratégique entre plusieurs nations qui façonne des rôles économiques critiques qui résistent aux pressions ou conflits régionaux. Ces domaines clés comprennent notamment le transit, l’énergie, la finance, le commerce des matières premières et la technologie.
Sur le plan théorique, le développement économique s’inscrit dans des relations économiques internationales intenses mêlées à la politique et au pouvoir. Avec le modèle de mondialisation occidentale déclinant, le monde se dirige vers une régionalisation et une fragmentation où la résilience économique devient prioritaire face à l’efficacité traditionnelle.
Cette fragmentation se manifeste par une multiplication des risques géopolitiques, le développement de réseaux numériques concurrents, des barrières commerciales croissantes, et une reconfiguration des chaînes industrielles vers des blocs américains et chinois. L’économie devient un outil politique et stratégique au-delà de sa seule fonction mercantile.
Face à ces enjeux, la stratégie actuelle de l’Iran est centrée sur la sécurisation à court terme des chaînes d’approvisionnement vitales afin de réduire la vulnérabilité économique, notamment dans les matières premières et les mécanismes financiers. Cette sécurisation vise à empêcher que la dépendance ne soit exploitée comme levier économique ou arme contre le pays.
Parallèlement, l’Iran s’efforce de sécuriser ses exportations stratégiques, particulièrement celles de pétrole brut, pour garantir leur pérennité hors de la sphère d’influence étasunienne, consolidant ainsi la souveraineté économique nationale et la stabilité gouvernementale.